Abstract:

De quelque manière que l’on se place, le Chiapas est l’état le plus arriéré du Mexique. Son revenu par habitant est le plus faible des 32 entités fédérales, à peine 40% de la médiane nationale (figure 1). Son taux de croissance pour la décennie 2003-2013 a également été le plus faible (0,2 %)1, ce qui a fait passer l’écart de revenu entre le Chiapas et la moyenne nationale de 53 % à 60 %. C’est-à-dire qu’aujourd’hui, le revenu moyen d’un travailleur au Mexique est deux fois et demie supérieur à celui du Chiapas. Les deux États les plus pauvres suivants, Oaxaca et Guerrero, se situent 25% et 30% au-dessus du Chiapas.2 Selon l’Instituto Nacional de Estadística y Geografía de México (INEGI, Institut national de statistique et de géographie), le Chiapas est également l’État qui présente le taux de pauvreté le plus élevé (74,7%) ainsi que l’extrême pauvreté (46,7%).3

Ces grandes différences de niveaux de revenus entre les entités fédérales mexicaines se reproduisent comme dans une fractale au sein du Chiapas. En effet, alors que l’entité la plus riche (Mexico) est plus riche que la plus pauvre (Chiapas) par un facteur de six, la différence au sein du Chiapas entre la municipalité la plus riche (Tuxtla Gutiérrez) et la plus pauvre (Aldama et Mitontic) est par un facteur supérieur à huit.4

Comme il y a différents « Mexicos » au sein du Mexique,5 au Chiapas il y a aussi différentes sortes de Chiapas (Figure 2). Le revenu par habitant à Tuxtla Gutiérrez, à droite de la distribution, est supérieur de cinq écarts types à la moyenne de l’État. Vient ensuite une série de villes intermédiaires, San Cristóbal de las Casas, Comitán de Domínguez, Tapachula et Reforma, entre deux écarts types et demi et quatre écarts types au-dessus de la moyenne. Les autres municipalités du Chiapas suivent (122 au total), regroupées à l’extrême gauche de la distribution. En outre, tant les statistiques disponibles au niveau des villes que nos visites dans diverses municipalités du Chiapas semblent indiquer que des différences significatives existent également au sein de ces municipalités.

Depuis ce point de vue, les questions visant à savoir pourquoi le Chiapas est pauvre, ou ce qui explique son retard significatif par rapport à d’autres régions du Mexique, deviennent beaucoup plus complexes. Pourquoi certaines régions du Chiapas ont-elles des niveaux de revenus élevés, alors que d’autres régions restent stagnantes, entièrement dépendantes des transferts fédéraux et privées des avantages de la vie moderne ?

1 Il s’agit du taux de croissance du produit intérieur brut non pétrolier rapporté par l’INEGI, considéré comme plus représentatif du spectre productif. Quoi qu’il en soit, le taux de croissance global du Chiapas (-0,2%) a également été le plus faible parmi toutes les entités mexicaines pour la décennie.
2 Se réfère au PIB non pétrolier ; en termes généraux, Guerrero et Oaxaca sont 19% et 16% au-dessus du Chiapas.
3 Les chiffres de croissance se réfèrent à la décennie 2003-2013, les chiffres de la pauvreté sont ceux publiés par l’INEGI pour 2012.
4 Les comparaisons des municipalités du Chiapas sont effectuées sur la base des données de l’échantillon de 10% du recensement de la population de 2010, qui est représentatif au niveau de l’État.
5 Il s’agit d’une référence au rapport, A tale of two Mexicos : Croissance et prospérité dans une économie à deux vitesses, McKinsey Global Institute (2014).