Cette page a été inscrite au concours international des ophtalmologistes.

Tous les contributeurs:

Éditeur assigné:

Révision:
État assigné Up to Date

par Joseph Giacometti, MD le 17 février 2021.

Microphtalmos

Microphtalmos
Microphtalmos, oeil droit. Avec l’aimable autorisation de Jeffrey Nerad, MD. © 2019 American Academy of Ophthalmology
ICD-10

Le microphtalmos également appelé microphtalmie, est un trouble grave du développement de l’œil dans lequel un ou les deux yeux sont anormalement petits et présentent des malformations anatomiques. Bien que la microphtalmie et la nanophtalmie (également appelée microphtalmie pure) présentent un œil de petite taille, la nanophtalmie ne présente pas de malformations anatomiques.

Epidémiologie

La prévalence à la naissance de la microphtalmie a été estimée à 14/100.000 et touche 3 à 11% des enfants aveugles. La microphtalmie est communément bilatérale et elle ne présente pas de différences selon le sexe et la race.

Etiologie

La pathogénie précise de la microphtalmie reste inconnue. Il a été suggéré que, pendant la croissance oculaire post-natale, la diminution de la taille de la cupule optique, l’altération des protéoglycanes dans le vitré, la faible pression intraoculaire, la production anormale de facteurs de croissance et la production inadéquate de vitré secondaire peuvent contribuer à la microphtalmie. Certains cas de microphtalmie associée à un kyste peuvent résulter d’un défaut de fermeture de la fissure optique.

Des facteurs environnementaux et héréditaires peuvent contribuer à la microphtalmie. Les facteurs de risque environnementaux sont l’âge maternel supérieur à 40 ans, les naissances multiples, les nourrissons de faible poids de naissance, le faible âge gestationnel, les infections acquises pendant la gestation (rubéole, toxoplasmose, varicelle, cytomégalovirus, parvovirus B19, virus de la grippe et coxsackie A9), la carence maternelle en vitamine A, la fièvre, l’hyperthermie, l’exposition aux rayons X, l’abus de solvants et l’exposition à des médicaments comme la thalidomide, la warfarine et l’alcool. La plupart des cas de microphtalmie sont sporadiques, mais des modes d’hérédité autosomiques dominants, autosomiques récessifs et liés à l’X ont été décrits. Les mutations des gènes SOX2, OTX2, BMP4, CHD7, GDF6, RARB et SHH présentent un mode d’hérédité autosomique dominant, tandis que les mutations des gènes PAX6, STRA6, FOXE3, RAX, SMOC1, VSX2 sont associées à un mode d’hérédité autosomique récessif et les mutations BCOR, HCCS et NAA10 sont associées à un mode d’hérédité lié à l’X.

Diagnostic et évaluation cliniques

La microphtalmie est définie par un œil présentant une malformation anatomique et dont la longueur axiale est inférieure de deux écarts types à la moyenne pour l’âge, ce qui correspond à une longueur axiale inférieure à 21 mm pour les yeux adultes.

Les troubles oculaires peuvent affecter le segment antérieur et/ou le segment postérieur. Ils peuvent être associés à un colobome uvéal, d’où la classification générale en catégories colobomateuse et non colobomateuse. Les anomalies oculaires sont la microcornée, l’opacification cornéenne, la corectopie, l’ectopie lentisque, l’aniridie, la cataracte, la persistance de la vascularisation fœtale et/ou la dysplasie rétinienne. La microphtalmie peut être associée à un kyste orbitaire (tipiquement situé dans l’orbite inférieure) provenant du nerf optique où il communique habituellement avec l’espace sous-arachnoïdien.

L’acuité visuelle dépendra du type de malformations oculaires et surtout de l’atteinte rétinienne. Une bonne acuité visuelle peut être présente dans les yeux avec un petit iris ou des colobomes choroïdiens. En revanche, les yeux présentant une atteinte maculaire et de la tête du nerf optique ont une mauvaise vision.

Les yeux microphtalmiques sont généralement fortement hypermétropes, mais peuvent parfois être fortement myopes en raison de la formation de staphylomes dans la zone du colobome.

Évaluation systémique

La microphtalmie peut être associée à un retard mental, à des malformations craniofaciales (comme la fente labiale/palatine ou la microcéphalie) et à des malformations des mains et des pieds (polydactylie). Ce trouble oculaire peut survenir de manière isolée ou être syndromique (33-50%). Les syndromes associés à la microphtalmie sont le syndrome CHARGE, le syndrome de Duker, le syndrome de microphtalmie de Lenz, la dysplasie oculo-dento-osseuse, le syndrome de cryptophtalmie, le syndrome cérébro-occulo-facial, le syndrome de Goltz, le syndrome de Lowe, le syndrome de Meckel-Gruber, le syndrome du nævus basocellulaire de Gorlin-Goltz, le syndrome de Cross et la microphtalmie avec défauts cutanés linéaires.

Puisque la Microphtalmie peut être associée à ces anomalies non oculaires, l’examen physique (y compris l’examen dysmorphologique) est obligatoire pour déterminer la présence de caractéristiques cliniques distinctives.

Histoire familiale

Comme déjà mentionné, la microphtalmie présente souvent un schéma héréditaire et il est fondamental de réaliser un examen oculaire complet des deux parents et d’obtenir une histoire familiale sur trois générations d’anomalies oculaires, y compris la microphtalmie et le colobome.

Imagerie

L’échographie est le plus souvent utilisée pour déterminer la longueur du globe dans les yeux microphtalmiques et pour faire l’examen des orbites.

L’imagerie par résonance magnétique (IRM) est extrêmement utile car il y a une plus grande résolution des structures d’intérêt et aucune exposition aux radiations. Elle montre un globe petit et anormal et elle est utile pour l’évaluation des orbites. S’il y a un kyste orbitaire, il produit un signal homogène qui varie d’isointense à hypointense sur l’image IRM pondérée en T1, tandis que sur l’image pondérée en T2, le kyste apparaît hyperintense et il n’y a pas de rehaussement avec le gadolinium.

Les tests électrophysiologiques sont essentiels pour évaluer la gravité de la déficience visuelle et aident à déterminer à quel niveau se situe l’anomalie. Dans les cas de microphtalmie sévère, un potentiel évoqué visuel (PEV) flash établira si une quelconque fonction visuelle est présente. Un PEV à motif déterminera la gravité de la maladie et détectera tout dysfonctionnement du nerf optique tandis qu’un électrorétinogramme identifiera s’il y a un dysfonctionnement rétinien.

Puisque la microphtalmie peut être associée à des anomalies systémiques, il est important d’envisager une évaluation endocrinienne, un échocardiogramme et un examen échographique rénal.

Gestion

En raison du spectre phénotypique variable associé à la microphtalmie, les patients doivent être évalués par des équipes multidisciplinaires composées d’ophtalmologistes, de pédiatres et de généticiens cliniques. Si aucun syndrome n’est identifié dans l’enfance, un examen supplémentaire après trois ou quatre ans doit être effectué car de nombreux syndromes deviennent plus apparents à cet âge.

Traitement médical

Si la fonction rétinienne est détectable, la réfraction et le traitement de toute amblyopie sous-jacente sont essentiels.

Chirurgie

La microphtalmie entraîne l’apparition d’une asymétrie hémifaciale en raison d’un petit volume orbitaire par rapport aux témoins appariés selon l’âge. Les stratégies de reconstruction visent la prise en charge simultanée de l’hypoplasie des tissus mous et de la croissance osseuse asymétrique.

Si la longueur axiale de l’œil est supérieure à 16 mm, la croissance orbitaire a plus de chances d’être normale. Cependant, si la longueur axiale est inférieure à 16 mm, il est peu probable qu’elle favorise à elle seule une croissance orbitaire normale et il est nécessaire d’augmenter le volume de l’orbite dès le début pour éviter une asymétrie prononcée au cours de la croissance de l’enfant. La microphtalmie légère/modérée est généralement gérée de manière conservatrice avec l’insertion d’un conformateur (comme un œil prothétique mais non peint) alors que dans le cas d’une microphtalmie sévère, il est nécessaire de fournir un remplacement du volume endo-orbitaire en utilisant des implants de taille progressivement croissante. Les ostéotomies orbitales sont indiquées dans les cas plus sévères.

Lorsqu’un kyste orbitaire est présent, ses propriétés d’expansion sont exploitées et la chirurgie est reportée jusqu’à ce qu’il atteigne 90% du volume orbitaire, ce qui permet une ablation pour des raisons cosmétiques à peu près au moment où l’enfant commence l’école.

Prognostic

Le potentiel de développement visuel dépend des structures oculaires affectées et de la gravité des malformations. Le traitement vise à maximiser la vision existante et à apporter une amélioration au niveau esthétique.

  1. Académie américaine d’ophtalmologie. Microphtalmos. https://www.aao.org/image/microphthalmos Consulté le 15 juillet 2019.
  2. 2.0 2.1 2.2 2.3 2.4 Verma AS, Fitzpatrick DR. Anophtalmie et microphtalmie. Orphanet J Rare Dis. 2007;2:47. Publié le 26 novembre 2007. doi:10.1186/1750-1172-2-47
  3. Dharmasena, Aruna ; Keenan, Tiarnan ; Goldacre, Raph ; Hall, Nick ; Goldacre, Michael J (2017). « Tendances dans le temps de l’incidence de l’anophtalmie congénitale, de la microphtalmie et de la malformation orbitale en Angleterre : Étude de base de données ». British Journal of Ophthalmology. 101 (6) : 735-739.
  4. Morrison D, FitzPatrick D, Hanson I, Williamson K, van Heyningen V, Fleck B, Jones I, Chalmers J, Campbell H. National study of microphthalmia, anophthalmia, and coloboma (MAC) in Scotland : investigation of genetic aetiology. J Med Genet. 2002;39:16-22.
  5. Campbell H, Holmes E, MacDonald S, Morrison D, Jones I. Un modèle de capture-recapture pour estimer la prévalence des enfants nés en Écosse avec des défauts de développement des yeux. J Cancer Epidemiol Prev. 2002;7:21-28.
  6. 6,0 6,1 Shaw GM, Carmichael SL, Yang W, Harris JA, Finnell RH, Lammer EJ. Caractéristiques épidémiologiques de l’anophtalmie et de la microphtalmie bilatérale parmi 2,5 millions de naissances en Californie, 1989-1997. Am J Med Genet A. 2005;137:36-40.
  7. 7,0 7,1 Kallen B, Robert E, Harris J. The descriptive epidemiology of anophthalmia and microphthalmia. Int J Epidemiol. 1996;25:1009-1016.
  8. 8.0 8.1 Forrester MB, Merz RD. Épidémiologie descriptive de l’anophtalmie et de la microphtalmie, Hawaii, 1986-2001. Birth Defects Res A Clin Mol Teratol. 2006;76:187-92.
  9. 8 Weiss AH, Kousseff BG, Ross EA, Longbottom J. Simple microphthalmos. Arch Ophthalmol. 1989;107:1625-1630
  10. 9 Weiss AH, Kousseff BG, Ross EA, Longbottom J. Microphtalmos complexe. Arch Ophthalmol. 1989;107:1619-1624.
  11. Dolk H, Busby A, Armstrong BG, Walls PH. Variation géographique de l’anophtalmie et de la microphtalmie en Angleterre, 1988-94. BMJ. 1998;317:905-909.
  12. Warburg M. Une mise à jour sur la microphtalmie et le colobome. Une brève enquête sur les troubles génétiques avec microphtalmos et colobome. Ophthalmic Paediatr Genet. 1991;12:57-63. doi : 10.3109/13816819109023675.
  13. Weiland HT, Vermey-Keers C, Salimans MM, Fleuren GJ, Verwey RA, Anderson MJ. Parvovirus B19 associé à une anomalie fœtale. Lancet. 1987;1:682-683. doi : 10.1016/S0140-6736(87)90442-9.
  14. Knox EG, Lancashire RJ. Épidémiologie des malformations congénitales. Londres : HMSO ; 1991.
  15. O’Keefe M, Webb M, Pashby RC, Wagman RD. Anophtalmie clinique. Br J Ophthalmol. 1987;71:635-638.
  16. Bardakjian T, Weiss A, Schneider A. Spectre de la microphtalmie/anophtalmie/colobome. 2004 Jan 29 . Disponible à partir de : https://www.ncbi.nlm.nih.gov/books/NBK1378/
  17. 17,0 17,1 17,2 17,3 17,4 17,5 17,6 17,7 N K Ragge, I D Subak-Sharpe, J R O Collin, Un guide pratique de la gestion de l’anophtalmie et de la microphtalmie. Eye. 2007 21:1290-1300
  18. Traboulsi EI. Compendium des troubles héréditaires et de l’œil. New York : Oxford University Press ; 2005
  19. Kennedy RE. Retard de croissance et détermination du volume de l’orbite anophtalmique. Trans Am Ophthalmol Soc. 1972;70:277-297.
  20. Kennedy RE. L’effet de l’énucléation précoce sur l’orbite chez les animaux et les humains. Trans Am Ophthalmol Soc. 1964;62:459-510.
  21. Hintschich C, Zonneveld F, Baldeschi L, Bunce C, Koornneef L. Bony orbital development after early enucleation in humans. Br J Ophthalmol. 2001;85:205-208.